Le premier jour arriva. J'étais en quelque sorte impatient, impatient de voir ce que cela allait donner. Je ne pensais même pas à ce que — ni même à ceux que — j'avais laissé derrière moi. D'ailleurs, le manque ne se ressentait même pas. Du moins, c'était ce que je croyais. Je ne connaissais pas réellement le risque encouru en signant cela.
Rapidement, un afflux de socialisation s'insinua en moi. Certes, pas vraiment de nouvelles connaissances, mais néanmoins des contacts. Des soirées de Rôlistes s'instaurèrent régulièrement. À peu près tous les soirs au démarrage en fait. Mais rapidement, mes journées devinrent ternes. Le programme des cours était inintéressant, et ne servit qu'à me faire comprendre ce que je ressentirai de plus en plus puissamment avec l'écoulement des jours. Car les scénarios s'enchainaient rapidement, sans pouvoir se renouveler aussi vite, de sorte qu'en peu de temps ma réserve d'idées s'épuisa. Ce qui ne fut finalement pas si grave, vu que les occasions de jeu s'espacèrent peu à peu. Et que la monotonie commença à s'installer. Le soir, faute de mieux, j'allais me coucher. Faute d'énergie suffisante pour pouvoir survivre longtemps sans dormir également, je dois l'avouer. Je lisais, puis, inconsciemment, tendait ma main vers Lui. Mais pour quoi faire ? Il n'avait plus aucun pouvoir ici. Je le savais bien en venant ici, qu'il Lui faudrait du temps pour se recharger, afin de retrouver sa puissance originelle, mais je ne pensais pas que ce serait si dur. Là-bas, chaque jour, ils répétaient qu'ils offraient un moyen rapide de lui rendre toute Son énergie. Mais qu'en échange, ils Le surveillerait. Ils ne s'en cachait même pas. Ils savaient que je craquerais. Du moins, ils pensaient savoir. Il fallait que je tienne. Non, je ne pouvais pas. Alors, il fallait que je trouve un moyen de Le régénérer.
Le lendemain, tout était fin prêt. Mon évasion était organisée. Celle-ci aurait lieu dans trois jours. En attendant, ils tentèrent tout pour me convaincre de rester. Parfois plus de six heures dans la journée, ils m'offraient le savoir, le savoir du domaine que j'apprécie le plus. Mais je sais que je ne dois pas me laisser corrompre, ni me laisser intimider, lorsque, le lendemain, ils me font subir l'horreur, l'ennui suprême, faisant cohabiter à la fois la simplicité et l'inutilité pour donner un manque d'intérêt profondément ennuyeux.
Le lendemain, dernière ligne droite avant l'évasion. À nouveau, ils m'assommèrent de connaissances, que j'absorbe, avide. Ils ne le savaient peut-être pas encore, mais ils avaient d'ores et déjà gagné. Je reviendrais. Mais avant cela, je m'évaderai, l'espace d'une journée pleine, et de quelques fioritures. Car ils avaient de toute façon agi trop tard, pour mon plus grand bien, car ma fébrile volonté était sur le point de me fausser compagnie. L'heure de l'évasion était arrivée.
Trois heures que nous sommes partis. Après avoir dû nous coller à la masse, sur place et près de notre lieu d'arrivée, où on nous recherchait déjà, comme nous l'a prouvé la présence d'un policier que nous avons esquivé discrètement. Nous n'étions plus qu'à une ou deux minutes lorsque soudain, comme dans tout plan parfaitement millimétré, un imprévu se produisit. Tout s'arrêta. Le véhicule s'immobilisa. Carburant insuffisant. Et la prochaine réserve, à une dizaine de pas de là, en haut d'une cote, inatteignable. Il fallait faire vite. Heureusement, nous étions proches de lieux plus cléments, et notre réseau de contacts pu rapidement se mobiliser, tant et si bien que seulement une vingtaine de minutes plus tard, j'étais de retour, à quelques pas seulement de pouvoir Le recharger. Mais sur la trajectoire de ces pas, se dressaient nombre d'obstacles. Je crains tout d'abord que sous prétexte de célébrer mon arrivée, je ne dusse subir un violent interrogatoire. Mais je fus sauvé par une sorte de joute tribale à laquelle mes hôtes assistaient, à la fin de laquelle je pus profiter de l'ambiance festive générale provoquée apparemment par la victoire de leurs favoris pour m'éclipser discrètement. J'étais enfin sur place. J'étais fatigué, je ne pourrais pas L'utiliser longtemps ce soir, mais je pourrais au moins me servir un peu de Son pouvoir.