mardi 21 août 2007

Le Déchu, épisode 3

Cela faisait près de deux mois qu'il était parmi eux. Il aimait ces jours tranquilles parmi les animaux, où la pseudo-intelligence humaine ne compliquait pas l'existence. Il lui faudrait hélas bientôt s'en aller, ses actions sous forme animale étant tout aussi repérables que celles sous forme humaine. Le rare temps qui lui était offert avant de devoir disparaitre de nouveau ne l'était que parce qu'Ils n'observaient presque pas ce monde. Ils ne pouvaient envoyer personne sur place, car leurs actes, même involontaires, lors d'un simple survol du monde, pouvaient avoir des conséquences dramatiques, compromettant toutes les prédictions. Ainsi, Eux seuls, dont les pouvoirs étaient nettement supérieurs, pouvaient le retrouver. Heureusement pour lui, Ils avaient apparemment bien d'autres choses à faire.

Tout à coup, un bruit se fit entendre. Léger, sec, il ne parvint pas tout de suite à en déterminer la provenance, gênée par la perception médiocre que lui offrait ce corps. Peu après suivirent un barrissement, puis un bruit sourd. La chute d'une éléphante. Des braconniers. Avec une rapidité qui eût pu étonner les trafiquants pour le restant de leur vie, il chargea sur eux. Il voyait sa cible au loin, en train de recharger son arme. Il sentit un sentiment étrange naître en lui, un sentiment rare. Il ne venait pas de lui, mais de son hôte. Matthew détestait ce sentiment, sous l'emprise duquel il avait du mal à se contrôler. Il se sentit l'envie de tuer ces gens. Il sentit une petite piqûre. Il se sentit l'envie de leur faire subir ce qu'ils voulaient faire subir à son espèce. Peu à peu, leur image se rapprochait. Ils étaient plus grands, plus nets... Non, plus flou. Leur position n'était plus certaine. Il ne sentait plus ses pattes. Puis il ne sentit plus rien.


Les sensations de son corps laissèrent place à ses propres sensations. Il ressentait toujours la même chose. L'envie de se venger. Même après avoir quitté son hôte, les « sentiments » laissaient leurs marques pendant quelques minutes. Alors il continua à charger, de manière imperceptible pour ses adversaires cette fois-ci. Puis il arriva sur eux. Il n'était plus une réalité tangible, aucune collision n'eut lieu. Ils ne se rendirent même pas compte que quelque chose s'était produit. Il dépassa la zone de non-contact, dépassa la peau, et pénétra l'esprit d'un des hommes.


Les trois contrebandiers poussèrent un soupir de soulagement, s'appuyèrent contre leur véhicule. Puis, rapidement remis de leurs émotions, rechargèrent leur arme. Et il tira. La fléchette atteignit un des monstres en pleine poitrine. Il frappa ensuite de toutes ses forces le deuxième homme, avant de fouiller dans ses poches, à la recherche de ce que lui dictait sa colère. Cigarette. Allumette. Il gratta l'allumette, alluma sa cigarette, toussa un peu et la jeta finalement à terre. Il n'avait jamais supporté ce goût, cette odeur. Puis il prit les clefs du véhicule dans la poche d'un de ses « compagnons » assommés. Il s'approcha de la jeep, gratta une nouvelle allumette, et la jeta dans le réservoir.

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