lundi 18 août 2008

Encore un

Ça, c'est fait. Aujourd'hui – ou hier, comme toujours – était un grand jour pour moi, je suppose. Je peux maintenant légalement voler de mes propres ailes, afin d'enfin pouvoir me brûler au soleil et m'écraser sur le bitume dans la même journée. A partir d'aujourd'hui, je peux passer mon permis afin d'écraser plein de vieilles, avant de mourir en fonçant dans un platane qui traversait le trottoir, tout en encourant une peine plus sévère qu'auparavant – si jamais le doute n'est pas dissipé, non, je n'aime pas vraiment conduire, mais faut bien. J'ai la possibilité tant attendue de dilapider mon argent au casino, devoir payer mes amendes, me faire appeler encore plus souvent « monsieur » par les enfants – des envies de meurtre me viennent à chaque fois que j'entends ça, bien que je reconnaisse que ce soit toujours mieux que les fois où on m'a appelé mademoiselle –, me lamenter sur le fait que j'ai l'âge légal pour me marier mais que ma vie sociale actuelle ne me permette pas d'envisager ce cas à une échéance quelconque...

Outre ces détails gênants, il faut tout de même signaler quelques avantages non négligeables. Premièrement, je n'ai plus besoin d'une autorisation parentale pour m'inscrire en fac, renvoyer des documents administratifs ou traverser la rue. Deuxièmement, je peux voter. Ce qui risque d'augmenter mon désarroi face aux résultats, mais on fait avec ce qu'on a. Et enfin, troisièmement, j'ai le droit de boire tous les alcools dans les bars – ce qui me semble être, pour me famille, le fait le plus marquant de la majorité, étant donné que j'ai reçu une bouteille de champagne et une bouteille d'absinthe.

...

Bon, en fait, je crois que je ne vais rien changer.


Ah si, zut, j'ai plus le droit au tarif moins de dix-huit ans.

lundi 11 août 2008

Hello, Goodbye

Nous sommes bien plus nombreuses que vous ne pourrez jamais l'imaginer. Nous avons infiltré tous les domaines existants afin d'accomplir notre tâche. Bientôt, le monde sera complètement plié à notre volonté. Par notre intérêt porté aux plus jeunes, nous convertiront bientôt toute la population. Vous pouvez d'ores et déjà en percevoir les effets. N'avez-vous jamais vu une fille, semblant pourtant avoir terminé ou tout du moins bien avancé dans sa croissance physique et intellectuelle – le développement intellectuel n'étant pas toujours évident à mesurer, et n'ayant besoin ici que d'une précision sommaire sur le sujet, vous pourrez vous contentez pour vous en assurer de demander à votre victime si elle écoute les BB Brunes, ou toute autre question équivalente – soudain, alors qu'aucun événement grave – telle que la mort de ses parents, différentes substances psychotropes, un concert de Tokio Hotel, ou GTA, qui est la source du Mal, comme chacun le sait – ne vienne apparemment troubler temporairement sa santé mentale, enfiler des vêtements roses, hurler « Trop meugnoooooooooooooon » avant de se jeter vers un objet, un être humain, ou même un chat, absolument innocent, et n'ayant rien fait pour mériter tel traitement – sauf les chats, qui sont maléfiques – et de le serrer de toutes ses forces dans ses bras ?
Cette scène est aujourd'hui devenu courante. Car nous sommes partout. Que nous avons commencé à conquérir le monde. Bientôt, le monde ne sera plus que paix, joie, bonheur, amour ! Le monde sera entièrement soumis à la puissance du kawaï !
Les peluches à notre effigie vous accompagneront dans vos moments de tendresse. Nos vêtements seront à vos cotés toute la journée, nos pyjamas avec vous toute la nuit, nos agendas, cahiers et crayons seront vos compagnons de cours, nos téléphones vous serviront à faire entendre raison aux personnes n'ayant pas encore atteint l'illumination ! Et maintenant, grâce à nos cartes de crédits, vous pourrez vous acheter tous nos objets, finançant ainsi la purification du monde et de ses vices par le kawaï !
Une fois l'enfance atteinte par notre aura salvatrice, nous accompagnons nos fidèles tout au long de leur vie, grâce à nos téléviseurs, nos grilles-pains, nos portes-monnaies...
Notre armée est en marche. Vous, pauvres pêcheurs, ne pouvez plus rien contre nous. Vous serez sauvés. Aujourd'hui, moi, Kitty White, je rejoins les miens, pour combattre sur le front. Aujourd'hui, je vais donner l'exemple, faire le bonheur d'un enfant, et l'éloigner des chemins de la perversion. Notre quartier général quitté, j'atterris avec le reste de mon régiment dans un magasin. Pas pour longtemps car, à peine quelques heures après mon arrivée, je pars pour une mission en solitaire. Un couple m'achète. Vous me prenez sûrement afin d'assurer que votre enfant soit sur le droit chemin. J'accomplirais ma tâche, ne vous en faites pas. Et vous aussi, bientôt, j'aurais le pouvoir de vous accorder la rédemption, de vous sauver !

Quel bel enfant que voici. Nous serons heureux ensembles, crois-moi. Oh oui petite fille, grâce à moi tu ne connaitrais plus jamais la souffrance, ton monde ne sera plus que joie ! Tes vêtements noirs te quitteront, et les vêtements colorés à mon effigie les remplaceront ! Oh, tu me tends les bras, te me sers fort dans tes mains, de plus en plus fort, me tenant à bout de bras, tu me tords, mais que fais-tu, pourquoi me tords-tu ainsi ? Enfin tu me relâches. Je ne t'en veux pas, ne t'en fais pas, je suis ici pour toi, moi, Kitty White, en personne ! Mais quelle est donc cette boite que tu tiens maintenant ? Tu en sors un bâtonnet, tu le grattes, la flamme est belle, tu l'approches pour me montrer cette belle chose... Non, pas si près, ça fait mal, je suis ici pour te sauver, je suis ici pour ton bien, arrête çaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa

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Bon, juste pour vous dire que, malgré le surréalisme de ce récit, tout y est bien réel. Il y a bel et bien des cartes de crédits Hello Kitty (beaucoup trop même), le groupe BB Brunes existe vraiment, GTA est effectivement la source du mal, et il y a vraiment des dégénérées qui s'habillent en rose, font des câlins à tout et n'importe quoi en hurlant « trop meugnooooon » et aiment les chats (même si, comme on les comprend, elles essayent de cacher tout ça).

Sinon, comme c'est supposé être une chaîne d'assassinat d'Hello Kitty, beh je vais léguer ça à Mélo, dont le comportement largement fou et pro-kawaï m'a unspiré (même si elle lit pas ce blog ranafoot'), et à la première personne qui passera par ici et qui ne l'a pas encore fait (et si cette personne n'a pas de blog, elle n'a qu'à s'en créer un, et si cette personne ne veut pas, elle n'a qu'à envoyer des lettres à deux demi-douzaines de personnes à la place).

Sur ce, bonne nuit.

samedi 17 mai 2008

La Fin

Prologin, c'est fait. Très sympa. Très fatiguant aussi. Trente-six heures sans dormir, à tenter de faire en sorte que des hamsters veuillent bien ramener des pommes sans se jeter dans le premier trou qui soit sur leur chemin ou pas. Au moins maintenant, je sais à peu près comment m'y prendre pour faire une IA : pas du tout comme je l'ai fait, même si au final elle marchait plutôt pas mal. Je tenterai de ne pas renouveler mes erreurs la prochaine fois (principalement, ne pas faire tomber la crêpe qu'on vient de te préparer dans le bol de pâte à crêpe, après tu as un organisateur à dos pendant tout le week-end), et au moins j'ai un nouveau tee-shirt.

Prologin fini, retour à la maison (crevé) pour fêter l'anniversaire de ma sœur, et de découvrir qu'elle pense nommer le chaton-cadeau Chuck Norris.

Après ce week-end reposant, examen d'algèbre, puis d'astrophysique hier (avec, notamment, une question magnifique nous demandant de reconnaitre deux astronomes sur des tableaux...). Et maintenant, en un mot comme en cent : vacances (ou, en cent mots : période plus ou moins prolongée d'arrêt de travail, attendue impatiemment après l'ennui provoqué par celui-ci afin de pouvoir éprouver un ennui alternatif par son absence, se caractérisant par une propension à être encore plus fatigué que d'habitude, celle-ci à pour vocation l'oubli de toutes les connaissances accumulées durant l'année scolaire, afin de pouvoir de nouveau désespérer les professeurs grâce à la méconnaissance par leurs étudiants des conditions d'application du théorème de Taylor-Lagrange — seul des trois théorèmes de Taylor-Young, Taylor-Lagrange et Taylor reste intégral à être fondamentalement inutile, mais aussi seul à être demandé aux examens). Quatre mois de vacances, quatre mois pour terminer des projets ayant jusqu'à deux ans de retard, et pour trouver des choses à faire, parce que, sinon, ça va être un peu long.

Sur ce, je vous laisse, il faut que je me couche maintenant pour avoir une chance de me lever avant midi et regarder Bob l'éponge.

jeudi 8 mai 2008

Prologin, le voyage

Trois examens de passés. Mais, surtout, Prologin démarre demain. Donc, comme les trains entre Bordeaux et Libourne sont coupés à partir du huit, départ aujourd'hui et nuit chez mon frère. Quinze heures, départ du train. Quinze heures quinze, bruits bizarres, freinage d'urgence. On a heurté quelque chose. Éclats de rire lors de l'annonce « S'il y a un conducteur dans ce train, qu'il se présente au wagon de tête ». On apprend qu'on a heurté quelqu'un. La police, les pompiers et les pompes funèbres arrivent. On apprend qu'une vitre est cassée dans la locomotive. Dix-huit heures, on repart. À cause de la vitre cassée, la vitesse du train est limitée. Dix-neuf heures, arrivée à Angoulême, changement de train. Arrivée à Paris à vingt-et-une heures quarante-cinq.

Reste plus qu'à espérer que le concours se passe mieux que le voyage.

vendredi 11 avril 2008

Qu'est-ce qu'on se marre à la fac

Un petit texte fait une vingtaine de minutes. Contexte : cours de lettres et communication. Le prof nous dit de choisir un sujet parmi une liste, de préparer quelque chose dessus puis de passer à l'oral. Aucun thème ne m'emballe vraiment, alors je lance un dé pour choisir (en écartant d'office les pires trucs). Résultat : le choix.

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Ayant fait mon choix, le choix m'échoit. Méthode utilisée pour choisir : hasard prédéterminé, c'est-à-dire lancer un dé qui, selon son résultat, nous indique un choix, et le relancer tant que celui-ci ne nous convient pas. Une méthode très utilisée par ceux qui ne savent pas ce qu'ils veulent, mais qui savent qu'ils ne veulent rien.
Soit, mon choix est fait. Le choix est un choix de choix, et je n'ai que l'embarras du choix de ce dont je vais vous parler. Soit, je n'ai plus le choix, il faut me lancer.
D'ailleurs, beaucoup n'ont pas le choix — ou pas l'impression de l'avoir. Quand on n'en a pas les moyens, a-t-on seulement le choix de s'habiller en soie ? De même qu'il y a des choix impossibles, d'autres sont interdits. Quand la soie nous sied depuis si longtemps, où irions-nous choir si nous arrêtions notre choix sur d'autres vêtements ? Ah, ces personnes sans moyens, sans choix, ne connaissent pas leur bonheur. Pas besoin d'hésiter, la question du choix ne se pose même pas, ils n'ont pas le choix. Tandis que d'autres, qui préfèreraient un choix plus modeste, hésitent, longtemps : leur choix, au risque de tout perdre, et de ne plus avoir ensuite le choix, ou le choix que la société leur impose, afin d'avoir encore le choix, et d'encore se laisser dicter son choix par d'autres. Et il s'ensuit des cris, des larmes, des suicides, des enterrements et les petits fours qui vont avec.
C'est ça, le choix dans la société : faire hésiter les gens, afin que, désespérés, ils nous laissent choisir à leur place.

Si Sacha a ce choix que son chat soit soit pacha sans chichi soit Sissi qui passa, ce Sacha son choix ne saura, car il n'aura rien compris, et il finira par manger son chat, faute d'autre choix.
Alors, il faut arrêter de forcer les gens à faire leur choix : les encombrer de choix, c'est leur ôter le choix. Pour avoir le choix, il faut avoir le temps de réfléchir, de choisir, sans pression extérieure, ni sur son temps, ni sur son choix. Il faut, dans la société actuelle, laisser faire des choix, et pour cela, ne pas encombrer de choix idiots, ou d'un nouveau choix avant d'avoir pu arrêter son choix.
Ainsi, arrêtons de nous encombrer l'esprit entre nouilles ou riz, entrée ou dessert, poisson ou viande, fromage ou salade, et posons-nous les vraies questions : argent ou passion, mort ou vie, choix ou hasard ?

samedi 22 mars 2008

Team Devil, épisode 3

Ça paraissait pourtant être une bonne idée. Tous les arguments étaient là, le dossier était béton. On aurait pourtant dû s'en douter, y avait bien une raison pour que personne ne l'ait fait avant nous. Niveau meurtres, carnages, massacres, paniques générales et tout le bazar, rien à redire, ils sont naturellement doués. Par contre, niveau organisation, vie en communauté, plans de domination du monde, vision à long terme et assimilés, fallait rien espérer pouvoir en tirer. Pour la vision à long terme, on peut pas trop leur en vouloir, vu qu'ils ont l'art de se faire tuer en un rien de temps, et ce, malgré leur immortalité. Forcément, ça motive pas.

Dernière tentative de sortie, j'avais enfin réussi à former une bonne armée : plusieurs centaines de zombies, squelettes, vampires et autres momies. On était tous dans une petite baraque avant de se lancer à l'assaut. Les zombies ont commencé par faire tomber des torches sur les momies. Elles ont toutes brulé, entrainant la planque avec eux. Les zombis sont restés là à se faire cramer. Les premiers à réagir furent les vampires : ils ont pris leurs jambes à leur cou, fuyant dehors, oubliant par la même qu'il faisait jour. Les squelettes ont suivi, dans la cohue générale. Ils se sont rentrés dedans violemment, longtemps, jusqu'à ce que tous leurs os se détachent de leur corps pour échouer sur le sol. Ça se passait comme ça à chaque fois. Et maintenant, il ne me reste plus qu'un zombi qui n'avait pas réussi à trouver l'entrée de la planque, un squelette dépressif qui avait voulu se laisser mourir dans les flammes, et un vampire mégalo qui avait estimé que les autres ne méritaient pas sa présence à cette opération. Et en plus, ils sont exigeants sur le recrutement...

vendredi 21 mars 2008

Team Devil, épisode 2

Le jour va bientôt se lever. Tous ces êtres répugnants vont peu à peu proliférer. Y en a-t-il ne serait-ce qu'un seul parmi qui mériterait un tant soit peu de rejoindre mon état supérieur ? J'éprouve dors et déjà un dégoût certain à devoir m'abreuver de ces créatures abjectes, alors inviter l'un d'entre eux à me servir...

Il est déjà bien délicat de supporter les autres. S'accommoder du déficit, tout aussi bien physique qu'intellectuel, de mes compagnons, est d'une difficulté telle que bien peu de personnes peuvent simplement fournir l'effort de tenter de se la représenter schématiquement. Il n'y a bien que l'autre, là, qui a un niveau de culture suffisant afin de laisser éventuellement la possibilité d'envisager d'engager ultérieurement une conversation. Mais il n'appartient pas au même monde que moi. Un lieu empli de poussières, de flammes, de soufre, c'est cela son univers. Bien loin de la distinction si particulière de l'aristocratie que je représente — et dont j'ai hélas parfois l'impression d'être l'unique héritier. Et, qui plus est, il est tellement... arrogant. Toujours à vouloir me donner des ordres, à moi !

jeudi 20 mars 2008

Team Devil, épisode 1

La nuit m'ennuie. Non pas que le jour me manque. Faudrait voir à pas se méprendre. Je l'exècre depuis que je ne le supporte plus. Mais je me surprends parfois à regretter les jours où je les aimais, ces jours. Certainement pas envie de gambader dans les prés, de bosser, de bécoter ou de faire mes courses, mais juste envie d'en avoir envie.

J'en viens à envier mes collègues décérébrés, incapables de comprendre le moindre de mes maux. J'aurai pu avancer, massacrer, « vivre », et me faire trucider en moins de deux sans jamais avoir à réfléchir. Mais mère Nature en a décidé autrement. Quelle emmerdeuse.

samedi 15 mars 2008

Le Jour est venu

Je me résous à rompre le charme du quarante-deuxième message de cette catégorie — après tout, il vient un jour où il faut savoir oser. Mais, face à l'immense tristesse que me procure cet acte innommable, je me vois contraint de faire court afin de me reclure le plus vite possible dans un monastère intellectuel.

En bref donc, nouvelle « Rouge » terminée. Il était temps, le concours de nouvelles universitaire finissait demain (ou aujourd'hui, voire lundi si on consulte le règlement à un autre endroit — ils sont très forts). Au dernier moment, comme d'habitude. En même temps, à m'y remettre sérieusement deux jours avant parce qu'en fait le début ne me plaisait pas, et donc à tout recommencer, c'est forcément légèrement plus risqué. Surtout pour obtenir un résultat qui ne me plait pas (il faut dire qu'en ce moment, pas grand-chose de ce que j'écris ne me plait).

Mais maintenant, détente : lecture des BD récemment achetées, et direction la Journée Portes Ouvertes du Lycée du Futuroscope (oui, c'est juste pour éviter d'avoir à écrire LP2I au lieu de LPI), et c'est parti pour démolir des ACF ! (Et accessoirement, avant cela, dormir, parce que ces temps-ci j'ai un peu oublié.)

dimanche 9 mars 2008

Le Déchu, épisode 7

Modification protocole expérimental numéro ELMX74ZF43D7O. Suivre protocole annoncé pour modification 9Z41ERRT18I1L avec sujet ZLF42. Faire accéder à salle de données instant M793A2778:18"44'86. Départ prévu après :14"7'.

Bilan modification 9Z41ERRT18I1L : conforme données prévisionnelles.

vendredi 7 mars 2008

Le Déchu, épisode 6

Il avait crié. Pourquoi fallait-il toujours que ces êtres hurlent au moment de leur mort ? Ils ne comprenaient même pas la chance qu'ils avaient, de pouvoir un jour vivre ça. Il enjamba le corps désormais inerte de l'homme, y jeta un dernier coup d'œil. Ils étaient Leur création. Et lui leur unique chance d'échapper au destin qu'ils leur avaient réservé. Grâce à lui, il sortirait des sentiers qu'Ils avaient tracés, et leur « libre arbitre » pourra, pour la première fois, réellement exister. Il suffisait que lui existe, leur parle, et leur destin changeait. Et ils n'avaient plus de destin.

Matthew ouvrit un congélateur, en sortit un tube. Tandis qu'il se dirigeait vers la sortie, il commençait tout juste à se calmer. Pourquoi s'embêter à tous les tuer ? Peut-être sont-ils foncièrement mauvais, peut-être ne méritent-ils pas de vivre. Mais, après tout, ce n'était pas de leur faute, mais de la Leur. Et lui pouvait les faire changer. Eux aussi d'ailleurs, mais ceci ne semblait pas faire parti de leurs plans. Pourquoi s'embêter à tous les tuer ? Il serait tellement plus intéressant de les laisser vivre. Cela offrait tellement plus de possibilités à terme.

— On ne bouge plus !

Matthew jeta un œil sur le garde. L'arme braquée sur lui, il continua d'avancer. Oui, il arriverait à tellement plus de choses ainsi. Il pourrait bien plus longtemps contrecarrer Leur expérience. Peut-être même se pourrait-il qu'ils deviennent sa propre expérience... Mais, était-ce au juste réellement une expérience ? Non, plutôt un jouet pour eux. Ils n'avaient pas besoin d'expérience, ils pouvaient déjà tout savoir.

Une détonation retentit. Matthew commença à ressentir la douleur. Elle passerait vite, dès qu'il quitterait le corps.

Changer leur destin ne mènerait peut-être à rien, au final. S'il ne s'agissait que de jouets, et non pas d'expériences, qu'ils ne fassent pas ce qu'Ils voulaient n'importait pas. Pire, cela risquait de les divertir. Qu'un jouet bouge de lui-même, ça ne gène pas, ça amuse. Il n'y avait décidément que lorsqu'il était en colère que Matthew arrivait à réfléchir convenablement. Il devrait s'arranger pour l'être plus régulièrement. Se « réincarner » plus souvent sous une enveloppe animale plutôt qu'humaine. C'est d'eux que venait la sagesse. S'il changeait le destin de ce monde, ce n'était pas comme s'il jouait à Leur place, pas comme s'il leur volait leurs jouets, mais plutôt comme s'il leur présentait une pièce de théâtre. Pour les contrarier, il fallait casser leur jouet.

Enfin, il quitta le corps de son hôtesse. Et fonça sur celui du garde.

jeudi 6 mars 2008

Le Déchu, épisode 5

Il avança lentement, de quelques pas. Vérifia que personne ne l'observait.

Le plus énervant dans sa situation présente, c'est qu'il ne pouvait plus savoir la suite que les évènements allaient prendre — depuis son départ, bien trop de variables avaient été modifiées, et seul, il manquait de puissance de calcul. Il ne pouvait donc jamais être certain que son travail irait jusqu'à son terme.

Deux personnes dans le couloir. Ils discutent, marchent... S'arrêtent. Reprennent leur discussion. Font marche arrière. S'arrêtent de nouveau. Matthew était patient. Il avait quelques millénaires devant lui s'il le fallait. Beaucoup, au cours de son existence, l'avaient défié à un tel jeu de puissance. Tous avaient fini par abandonner. Avoir l'habitude de passer des siècles sur un simple calcul l'avantageait grandement dans ce genre de duel. Et quand cela ne suffisait pas pour décourager ses adversaires, l'immortalité lui permettait de simplement attendre leur mort.

Certes, il avait tout son temps, mais cette hésitation continuelle de l'espèce humaine l'exaspérait au plus haut point. Soit ils avaient besoin d'avancer, soit de reculer, auxquels qu'ils le fassent. Mais s’ils avaient juste envie de parler, qu'ils restent immobiles, au lieu de continuellement changer de direction afin de ne pas se séparer. Un simple jeu d'apparences totalement inutile, puisque son seul but est d'être percé à jour.

Il lui fallut attendre plusieurs heures avant que le couloir ne soit totalement vide. Il put enfin s'approcher de la porte, insérer sa carte, franchir le seuil...

— Enfin, je vous ai cherché partout, je peux savoir ce que vous faisiez au juste ?

mercredi 5 mars 2008

Le Déchu, épisode 4

De la colère toujours. Et maintenant, qui plus est, de la douleur. Ne peut-on pas mourir de façon horrible sans souffrir ? Il avait envie de tuer. Encore. Toujours. Il lui fallait reprendre ses esprits. Il tournait, tournait encore autour de la Terre. S'arrêta brusquement. Il fallait qu'il se calme. Une ville.

Pourquoi fallait-il, malgré tout le mépris et la répugnance qu'il pouvait éprouver vis-à-vis de cette espèce, qu'il emprunte si régulièrement un corps humain ? Mais au moins, sous cette enveloppe, il pouvait faire fi de la majorité des sentiments éprouvés. Il pouvait réfléchir et agir sans se référer sans cesse aux instincts animaux de son hôte. Et puis, après tout, il les aimait. Les enviait. Ils n'avaient aucune conscience des forces supérieures qui s'imposaient à eux. Ils pensaient, ils vivaient, en tant qu'espèce la plus intelligente à leur connaissance. Ils pouvaient faire ce qu'ils voulaient — la science et la technologie, même aussi primitives que la leur, au vu de leur compréhension fort limitée de certains principes théoriques fondamentaux, laissait le champ libre à la réalisation de toutes leurs envies, leurs folies. Aucune autre espèce ne pouvait s'opposer à eux. Ils décidaient de la vie et de la mort des autres. Pouvaient tuer d'un simple geste. Mais aussi parfois garder en vie pour « étudier ». Il les haïssait. Tout cela lui rappelait ce qu'il avait vécu, avant. Il avait envie de tous les tuer. Cette envie était chronique. Bien sûr, sur le plan individuel, il trouvait des raisons de sauver chaque personne, mais sur le plan collectif... C'est d'ailleurs pour ça qu'il ne tuait jamais une seule personne. Lors de ses précédentes prises de conscience, il n'avait jamais tué moins de dix mille personnes à la fois. Mais ensuite, toujours, il se calmait. Regardait le désespoir dans quelques paires d'yeux, s'attendrissait devant leur méprisante impuissance et leur abject attachement aux êtres et aux choses, et finalement abandonnait. Mais peut-être aurait-il plus de courage cette fois-ci...

Il tournait, encore et toujours, laissant ses yeux se poser furtivement sur chaque élément du décor voulant bien se présenter à lui. Puis, subitement, il s'arrêta. Il venait enfin de voir un endroit convenable pour ses affaires.